
Par Luc Abaki
J’ai eu un débat très intéressant avec un ami ministre mercredi à la suite d’une rencontre fortuite. Il portait sur les budgets des États avec en exemple, celui du Togo qui consacre 129 milliards de francs cfa pour la défense en 2021 alors que d’autres secteurs que l’on considère vitaux ne bénéficient même pas du tiers d’un tel montant défini pour l’armée.
Dans son entendement, il me faisait comprendre qu’avant toute chose, il faut d’abord que le pays ainsi que son peuple soient sécurisés. Donc à ses yeux, la priorité doit revenir à la défense, bref à l’armée surtout qu’il existe ces dernières années, des enjeux de terrorisme, de djihadisme, d’insécurité etc, il faudrait mettre le paquet dans la formation et l’équipement de l’armée qui, malheureusement coûtent très cher.
J’ai trouvé son raisonnement pertinent, car sans la paix et la sécurité, rien n’est possible à un peuple.
Mais il y’a une nuance, ou j’allais plutôt dire, un travestissement que je souhaite partager avec vous.
L’insécurité, la guerre, les rébellions, les révoltes qui portent un coup à la paix et à la sécurité dans un pays naissent en réalité de quoi?
Des frustrations engendrées par les clivages sociaux et le manque d’équité dans la répartition des richesses de l’État…
En clair, l’insécurité que les Etats redoutent tant a une racine qui s’explique par ces manquements dont je viens de faire état à l’instant.
Si tel est vraiment le cas, quelles doivent être les priorités dans l’élaboration du budget d’un État qui a réellement de la vision pour le moyen et le long terme?
La réponse à une telle question exige plus de lumière sur certaines réalités évidentes. D’où vient l’argent qui alimente le budget de vie d’un pays ?
De toute évidence, du labeur du peuple. En clair, plus le peuple est productif, mieux il génère l’argent pour l’État.
Mais comment le peuple devient-il productif?
A partir de l’éducation qu’il a reçue faisant de lui, un peuple discipliné, éclairé, ambitieux et déterminé à marquer la vie elle-même par ses oeuvres.
Ceci veut alors dire quoi? Que la priorité doit d’abord être donnée à l’éducation, à l’agriculture et à la santé qui, toutes les trois, permettent d’alimenter matériellement et intellectuellement un peuple tout en lui assurant un bon état physique et émotionnel.
Un peuple intellectuellement, culturellement et vertueusement enrichi, est capable de tripler, voire quadrupler sa productivité.
Il serait inimaginable qu’un pays comme la suisse consacre plus de ressources au secteur de la défense, car la paix y régnant et le peuple étant suffisamment bien éduqué, sait se consacrer au travail bien fait qui génère naturellement de la richesse pour le pays.
Des puissances comme les USA, l’Allemagne, la France ou la Russie mettent plus de ressources dans l’armée pour une raison de conquête du monde, d’affirmation de pouvoir que les pays qui, pour l’instant se cherchent en Afrique, n’ont pas encore et ne devraient même pas rêver d’avoir avant d’avoir assuré la survie effective de leurs peuples.
Cela dit, la priorité que l’on donne à l’armée est nécessairement discutable sinon contestable, car avant de chercher à assurer la sécurité d’un peuple, il faut d’abord lui garantir l’existence ou la vie tout court, qui passe en premier par l’assurance de ses repas, de sa culture intellectuelle et de sa bonne santé physique et émotionnelle. J’en suis convaincu.